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Vers...écologique&féministe

Vers une transition écologique... et féministe

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Vers une transition écologique... et féministe

 

Pour l'économiste Gaël Giraud, l'avenir de l'Occident est la femme

Le lien entre le combat écologique et la question du féminisme me semble d'autant plus évident que le machisme et le patriarcat, en vigueur depuis 5000 ans, ont conduit à la destruction de la Terre. Le patriarcat méditerranéen s'invente en Mésopotamie entre le IIIe et le IIe millénaire avant Jésus-Christ, dans les familles de nomades pauvres où les pères endettés sont contraints de vendre leurs filles ou leur femme pour rembourser leurs dettes. 

La virginité d'une femme devient alors une « preuve »que son père a payé ses dettes. Le port du voile (qui n'a donc rien à voir avec l'islam) en est la démonstration publique : les prostituées, elles, sont tête nue. Or la violence des créanciers citadins de Sumer, Assur ou Babylone (« la prostituée »), qui esclavagisent les filles de leurs débiteurs, entretient un rapport souterrain, secret, avec la jouissance des humains qui, en mangeant de la viande, manifestent qu'ils trônent au sommet de la hiérarchie des prédateurs de la planète. Et aussi avec le mépris pour cette dernière que dissimule le productivisme contemporain et dont procèdent les désastres écologiques en cours. C'est ce que Jacques Derrida a tenté de désigner à travers le concept de« carno-phallogocentrisme », par où il associe le chasseur carnivore et phallocentrique au « logocentrisme »occidental, c'est-à-dire à une certaine métaphysique qui s'enracine chez Parménide, et qui confond l'être ou Dieu avec la violence.

C'est également ce que dénonce l'encyclique Laudato si'(123),  lorsque le pape François y écrit qu'une même logique est à l'oeuvre chez ceux qui violent des enfants, ceux qui abandonnent les vieillardsetceux qui prétendent que la toute-puissance des marchés (financiers, en particulier) permettra de relever les défis écologiques. Les chrétiens ont-ils réfléchi à cela ? Le productivisme financiarisé d'aujourd'hui est aussi criminel que le viol des enfants.

Or, nous sommes à la veille d'une transformation sociale tellurique,  où le pouvoir va probablement être conquis par les femmes en Occident. Pour la première fois de l'Histoire, en effet, les femmes y sont en moyenne plus éduquées que les hommes. C'est une bonne nouvelle pour les femmes elles-mêmes, pour les enfants et pour la planète ! À condition que les femmes au pouvoir ne se croient pas obligées de jouer les « mâles » de substitution. Le corps social masculin, petit à petit, commence d'ailleurs à en prendre conscience, je crois : les réactions populistes d'extrême droite sont aussi une manière de réaffirmer une autorité masculine violente et patriarcale.

L'Église catholique elle-même est confrontée à ce défi colossal.  Dans la deuxième moitié du XXe siècle, elle a perdu, en Occident, une bonne partie des classes populaires. Au début de ce XXIe siècle, son défi consiste à ne pas perdre les femmes. La sociologue Danielle Hervieu-Léger - qu'on ne peut guère soupçonner de malveillance envers le catholicisme - tire la sonnette d'alarme. « Faites attention,nous dit-elle en substance, ce sont les femmes qui portent l'Église. Si vous continuez à les tenir dans un statut de minorité, elles finiront, elles aussi, par quitter les sacristies. »

À lire 

L'Islam pensé par une femme, de Nayla Tabbara avec Marie Malzac, Bayard, 2018, 16,90€.

 

http://www.lavie.fr/debats/idees/vers-une-transition-ecologique-et-feministe-20-03-2019-97087_679.php